Nous avons longtemps pensé que nous étions des êtres rationnels dotés d’un libre arbitre, responsables de nos actes, et maîtres de nos propres intentions. Ces croyances sont le fruit de notre sens commun, qui nous pousse à croire que notre pensée précède notre comportement, et par conséquent, nous croyons à tort, choisir nos comportements en toute liberté.
Cependant, on doit savoir que les sciences sociales ont bouleversé ces fausses croyances et nous ont démontré à travers de multiples études sociales et expériences empiriques que ce raisonnement qui paraît logique au premier abord n’est pas forcément vrai et c’est plutôt le contraire qui se produit, c’est-à-dire que nous sommes très influençables par l’extérieur et autrui bien qu’on garde le sentiment d’être libre et décideur de nos actes, grâce à de multiples mécanismes d’illusion.
Par exemple, nous avons tendance à négliger les causalités situationnelles en attribuant un acte aux dispositions de l’agent ou à ses intentions, c’est ce qui est appelé « erreur fondamentale d’attribution ». Nous pensons nos actes comme la conséquence directe de nos propres décisions et nos intentions, mais en réalité d’après la théorie de dissonance cognitive de Festinger, notre conscience est en permanence ajustée à notre comportement, sauf que cet ajustage est fait tellement vite qu’on ne s’aperçoit pas du vrai ordre chronologique de la chaine causale entre intension et comportement.
D’autre part, il a été démontré par Libet que le signal cérébral précède l’apparition de la volonté. Mais comme la prise de conscience se réalise juste avant le mouvement corporel, on pense que c’est notre intention qui est à l’origine du mouvement, ce qui alimente l’illusion d’une décision prise librement, or il n’en est rien. Puisque la production de la volonté nécessite un laps de temps et avant l’aboutissement de ce processus cognitif, on ne peut sentir sa propre volonté. Cette dernière ne peut donc constituer le point de départ de l’action. Donc ce n’est pas l’intention qui déclenche notre action.
Ces caractéristiques fictives d’une intention libre et volontaire servent uniquement à maintenir deux autres notions qui sont la liberté de l’individu ainsi que sa responsabilité effective. Dans le monde moderne pour être moralement responsable, l’homme doit être libre, et pour être libre, il doit être maître de ses discisions et intentions, or les sciences ont démontré que non. La conception causale de la responsabilité́ s’appuie uniquement sur la notion d’intention constituant la cause de l’action. Mais, si l’intention ne peut pas provoquer l’action correspondante, puisqu’elle n’est pas la vraie cause. On ne pourrait plus prendre cette intention-causale pour une volonté́. En réalité, l’intention n’est pas une variable indépendante expliquant la variable dépendante qui est l’action. Mais il s’agit uniquement d’un phénomène social, car l’intention n’est pas un état psychologique situé dans l’individu. C’est un mode social d’appréhension de l’existence humaine.
Pour conclure, l’intention décrite comme étant volontaire et choisie par notre conscience propre, source subjective de l’action n’existe pas en soit, c’est une illusion qu’on se donne, une construction sociale tout comme la notion de liberté et de responsabilité qui sont tout autant illusoires que l’intention et les expressions qui y réfèrent ne sont que des actes de langage permettant aux acteurs sociaux d’interpréter la conduite humaine.
-M.